Source: AP
Noëlle Lenoir, ancienne ministre des Affaires étrangères et ancienne conseillère au Conseil constitutionnel
En accusant publiquement «des millions d'Algériens» en France de représenter une menace, l'ancienne ministre Noëlle Lenoir a déclenché un véritable scandale. L'affaire intervient alors que les relations franco-algériennes sont au plus bas, minées par des tensions diplomatiques, des restrictions administratives et des mesures de rétorsion mutuelles.
Le 8 août, sur le plateau de l'émission « L'Heure des pros » de CNews, l'ancienne ministre française Noëlle Lenoir a affirmé que « des millions d'Algériens représentent des risques majeurs » et a suggéré qu'ils devraient être maintenus en rétention administrative « jusqu'à 210 jours ». Elle a évoqué le risque que ces personnes « commettent des violences dans l'espace public ».
Ces propos ont suscité une vague de condamnations. L'organisation SOS Racisme a annoncé le dépôt d'une plainte pour injure publique à caractère raciste et a saisi l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle, accusant CNews de « banaliser le racisme dans le débat public ». Dominique Sopo, président de l'association, a dénoncé « une offensive raciste » et « le naufrage d'une partie des élites ».
Réaction algérienne et procédures judiciaires
En Algérie, la réaction a été immédiate et ferme. La députée écologiste Sabrina Sebaihi a saisi la procureure de Paris, estimant que ces propos « stigmatisants et diffamatoires » relèvent du délit d'incitation à la haine raciale. L'Union française des binationaux et de la diaspora algérienne a engagé une procédure contre CNews, réclamant des excuses publiques et une amende de 50 000 euros.
Une crise bilatérale déjà profonde
Cet épisode s'inscrit dans un climat diplomatique explosif entre Paris et Alger. Emmanuel Macron a ordonné la suspension des exemptions de visa pour les diplomates algériens et durci les conditions d'octroi de visas, en représailles au refus de l'Algérie de réadmettre ses ressortissants expulsés. Depuis l'été 2024, les tensions se sont aggravées après la reconnaissance par Paris du plan marocain pour le Sahara occidental, entraînant le rappel d'ambassadeurs et l'expulsion de diplomates.
Alger a récemment mis fin à la gratuité des biens prêtés à l'ambassade de France et revu à la hausse les loyers, invoquant un principe de réciprocité. Cette accumulation de mesures hostiles entretient un climat de méfiance où chaque déclaration polémique, comme celle de Noëlle Lenoir, devient un nouvel outil de confrontation.